Historique de Lire Jung au Gerpa
(août 2019)
Notre association a été créée en 1968 et elle a été appelée le GRPA, le Groupe de Recherche de Psychologie Analytique. À son origine, un petit groupe de personnes, médecins, neuropsychiatres, psychologues, qui avaient eu la possibilité de lire les œuvres de Jung, ou de le rencontrer personnellement, et qui souhaitaient intégrer les concepts et la méthodologie clinique issus de la théorie jungienne à leur pratique.
Dès le départ, donc, les objectifs du GRPA ont été multiples : d’une part le désir d’étudier l’œuvre de Jung, une œuvre anticonformiste, vaste et complexe, d’autre part le désir de l’utiliser dans leur propre pratique, institutionnelle et privée. À cette époque de pionniers, plus que jamais, cette tâche ne pouvait relever que du registre de l’expérimentation : tout était à inventer, à créer. Ils s’y sont mis, avec enthousiasme et avec créativité, justement.
Mais peut-on dire que le temps de l’expérimentation est, un jour, un temps révolu ? Peut-on se séparer d’un esprit de recherche, recherche à entendre au sens le plus large du mot, c’est-à-dire une recherche qui n’est pas confinée dans des univers lointains et inaccessibles mais qui nous concerne tous, tous les jours, dans toutes nos activités, les plus banales comme les plus complexes. Bref peut-on se passer d’une attitude de créativité ? Bien sûr, nous croyons que non. Nous croyons, en revanche, que la créativité est bien une nécessité qui incombe aux humains, une nécessité certes engageante mais ouvrant aussi aux dimensions du désir et de la rencontre.
Très peu de temps après sa création, le destin du GRPA a été lié à celui d’un autre rassemblement de jungiens, la SFPA, la Société Française de Psychologie Analytique. Ces mêmes membres fondateurs du GRPA, ont souhaité, en effet, inscrire le mouvement jungien français dans la mouvance jungienne internationale et ont créé, avec d’autres personnes, une société, la SFPA, pour laquelle ils ont demandé, et obtenu, l’affiliation à la société jungienne internationale, la IAAP. À l’intérieur de la SFPA, ils ont ensuite créé, en 1974, l’Institut Carl Gustav Jung de Paris, dont le but était, et demeure, la formation des analystes jungiens. La création des deux associations a été donc presque simultanée et, depuis, les liens entre elles ont été très étroits. De très nombreux analystes de la SFPA « ont fait leurs classes » au Gerpa, avant de demander à être admis à l’Institut C.G. Jung de la SFPA.
Le GRPA des origines a connu une première modification de son nom et de ses objectifs en 1982, suite justement à la création de la SFPA et de l’Institut C.G. Jung. Dans la toute première version des statuts de 1968, à l’article 2, on peut lire en fait que l’objectif de l’association est « la collection et la divulgation des travaux et observations individuels, la constitution de commissions d’études spécialisées et la divulgation de leurs travaux, en vue du progrès de la science ». Le modèle du GRPA est, de toute évidence, celui d’une société savante.
Dans les statuts modifiés de 1982, le GRPA devient le GERPA, le Groupe d’étude et de Réflexion de Psychologie Analytique. Et à l’article 2, on peut lire que « L’Association a pour objet l’étude en commun et la réflexion sur la Psychologie Analytique de C.G. Jung, par le travail en groupe de ses œuvres, ses concepts, sa pensée ». De ce fait, si le GRPA avait été un des premiers lieux de réflexion théorique et clinique des jungiens de l’époque, la création de la SFPA et de l’Institut venait poser une nette démarcation entre le travail théorique sur les œuvres de Jung et la formation des futurs analystes.
Pour compléter le tableau de l’époque, il faut dire que depuis 1928 existait aussi une autre association ayant comme but la connaissance et la diffusion de la pensée jungienne, le Groupe d’Étude C.G. Jung. Il fonctionnait, et fonctionne aujourd’hui encore, essentiellement via des conférences, ouvertes à tout public.
Une deuxième modification du nom de l’association, devenu désormais le GERPA a été souhaitée en 2015. C’est à ce moment que le GERPA est devenu Lire Jung au Gerpa. La raison de cette modification est double. D’une part elle est liée à notre époque, une époque où la communication est indissociable des réseaux sociaux et d’internet. Un internaute à la recherche d’un groupe de lecture ou de toute autre information concernant Jung aurait très peu de chances de tomber sur un site informatique dénommé Gerpa. Il était donc indispensable que le mot Jung apparaisse dans le nom de l’association et du site. Mais un autre mot nous a semblé indispensable, le mot « lire ». Un mot que nous affectionnons particulièrement, un mot qui met en tension tant de couples d’opposés si chers à Jung : solitude et proximité, pensée et émotion, subjectivité et altérité, monologue et dialogue, et surtout un mot qui invite au temps de la réflexion.
C’est tout cela que nous essayons de faire, aujourd’hui, dans nos groupes de lecture, où chaque animateur propose à l’étude soit des œuvres de Jung, soit un concept ou une problématique, on crée des liens entre ces œuvres de Jung et celles d’auteurs post jungiens, on lit des auteurs issus d’autres écoles et d’autres disciplines. La dimension de la psyché individuelle nous importe tout autant que celle de la psyché collective, dans la tentative de comprendre notre fonctionnement individuel et celui des sociétés dans lesquelles nous vivons.
La discussion dans les groupes est libre, très souvent animée. Nous proposons aussi des journées d’études et des présentations d’ouvrages d’auteurs jungiens.
Notre objectif pour le futur est de poursuivre dans la voie de la lecture et de la recherche, dans un espace-temps où la frontière entre les deux est subtile. Une recherche qui est ouverture et questionnement, qui ne va pas dans le sens des spécialistes vers les non spécialistes, mais les laisse dialoguer, s’interroger, réfléchir, pour des lectures toujours renouvelées.